Le défi du transport du charbon dans les Cévennes
durant la Révolution Industrielle
La Révolution Industrielle a bouleversé l'histoire de la petite
commune de Ste Cécile d'Andorge l'exploitation du charbon sur son territoire
et dans son voisinage immédiat a donné naissance à deux
compagnies minières : la puissante Compagnie de la Grand'Combe et celle
de Portes et Sénéchas. Cest à cette dernière que
l'on doit la construction d'un chemin de fer atypique qui transportait le précieux
minerai jusqu'à la gare terminus de la Levade. Appelés "plans
inclinés ", cette sorte de funiculaire a fonctionné de 1859
à 1867. Roulant sur des rails, les wagons pleins tractaient les wagons
vides par un système aérien de câbles en fibres textiles.
La municipalité de Sainte Cécile d'Andorge a engagé la
commune une restauration de certains ouvrages d'art qui jalonnent le parcours
dont deux tours de guet. Le bâtiment carré qui est attenant aux
tours abritait le tambour autour duquel s'enroulaient les câbles moteurs
et du frein. Du haut des tours dites du Simonet et des Pinèdes, un serre
frein surveillait le trajet des wagons, et actionnait le puissant mécanisme
en acier. L'idée est de percer un minimum de tunnels et d'utiliser le
relief et les pentes : Adrien Bourdalouë est l'homme qui a conçu
ce système : L'ingénieur n'est pas à son premier coup d'essai
: il a déjà expérimenté 10 ans avant un tel procédé
entre les mines de Champclauson et la Levade. Ce dernier roulage va fonctionner
pendant près d'un siècle. Adrien Bourdalouë n'est pas un
inconnu. Il a dirigé l'équipe qui a effectué le nivellement
du futur canal de Suez, ôtant du même coup à Ferdinand de
Lesseps une grosse épine. On lui doit le nivellement général
de la France ( pour cela il aura du apposer en tout 15 000 poinçons).
Mais les plans inclinés de Portes et Sénéchas, véritable
défi technologique qui se joue des "montagnes russes" sont
un demi échec : le tonnage de ce chemin de fer que l'on peut qualifier
de farfelu ne dépassera jamais 150 000 tonnes par an, ce qui était
trop peu en comparaison de la production des mines de la Grand'Combe ( 500 000
tonnes en 1864). 55 employés travailleront à la manceuvre de ces
plans.
Ces ouvrages par l'ampleur de leur construction et de leur coût illustrent
les difficultés de transport du charbon dans les Cévennes durant
la Révolution Industrielle et l'entêtement des financiers du Second
Empire prêts àtout pour sortir "ce prince noir qu'on sort
de la terre".
Ils pourront bientôt être inscrits dans des parcours scolaires en direction des enseignants en histoire.
3 procédés techniques en un seul chemin de fer
des plans à machine à vapeur ( deux machines : Pourcharesse et
Péreyrol )
des plans dits gravitaires : entre le Péreyrol et la tour des Pinèdes
des plans dits "bis automoteurs" ( sur le reste du trajet)
Voir quelques détails techniques
La Révolution Industrielle dans le nord du Gard en quelques dates
1836 Paulin Talabot ( 1799 1885) et ses associés achètent les
concessions de la Grand'Combe : 10/24éme de la concession de Portes.
Concessionnaire de la ligne de chemin de fer : Beaucaire Alès
1842 : Ouverture de la ligne de chemin de fer d'Alès jusqu'à la
Levade
1848 troubles révolutionnaires, et violences contre les piémontais
1852: dissociation du chemin de fer et des mines par François Beau, le
directeur général
1853: Jules Mirès ( 1809 1871) achète la Compagnie de Portes qui
fait partie de la Société de l'éclairage au gaz et fonderies
de Marseille
1855: la Cie de la Grand'Combe devient société anonyme dont l'actionnaire
majoritaire nest autre que James de Rothschild (1792 1868) qui possède
10000 actions sur les 16000
Pour écouler
son charbon Jules Mirès décide de construire un chemin de fer
d'embranchement, à travers les vallées pour rejoindre la gare
terminus de la Levade.
1859 : les plans inclinés de Portes et Sénéchas sont inaugurés.
Décembre 1860 : Jules Mirès, qui a reçu la légion
d'honneur des mains de Napoléon III, est arrêté le lendemain
par Le Conte De Persigny, ministre le l'intérieur : accusé de
banqueroute, et de mauvaise gestion de la caisse des chemins de fer qu'il préside,
il est finalement blanchi mais doit se retirer des affaires.
1867: ouverture de la ligne la Levade, Ste Cécile, Chamborigaud qui rend
caduque les plans inclinés. Un nouvel embranchement relie les mines de
l'Ouguègne à Chamborigaud
Jules Mirés, l'homme qui s'opposa à Rotschild, et qui fut le pendant des frères Pereire sous le Second Empire |
Laurent Aiglon - 01/2005
Voir les photos de l'état actuel des Plans inclinés (en restauration) : Tour de Peyrerols - Tour de Simonet
Voir de vieilles photos des Plans inclinés
Voir des détails techniques
Voir les cartes et coupes des Plans inclinés