Le compoix de la paroisse de Sainte Cécile d'Andorge (1641)
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Le compoix, c'est le livre de taille, c'est à dire le cadastre de l'Ancien Régime : la taille est en effet l'impôt foncier que perçoit le roi de France sur la tête des propriétaires de la terre s'ils l'exploitent eux mêmes ou sur celle de leurs locataires : l'assiette de l'impôt se fait en fonction des revenus de la terre, il est donc proportionnel à l'étendu et la valeur des biens fonciers. Le percepteur est en général un propriétaire fortuné qui a obtenu le fermage dudit impôt : à lui de relancer les impayés et d'avancer à l'Etat les sommes dues… Ce n'est pas sans risque pour lui !
Le compoix de Sainte Cécile date de 1641. N'y figurent pas les pièces (1) franches qui furent exemptés d'impôt par le pape en remerciement de la participation des habitants des Ponchets (2) au paiement de la rançon pour délivrer le roi de France Jean II le bon captif des anglais.
Le compoix de 1641 fera foi jusqu'à la Révolution voire après, jusqu'en 1827, date de l'établissement du cadastre dit "napoléonien" où figurent plans et sections numérotées. Jusque là quand une terre changeait de main, le greffier inscrivait sur un livre à part les mutations, en se référant aux articles du compoix originel, de façon à ne pas encombrer ce dernier.
Qu'est ce qu'il y a dans un compoix, qu'est ce qu'on y voit ?
C'est une photographie exacte de l'activité humaine en 1641.
On y voit le nom des familles des cultivateurs, les métiers qu'ils exercent (artisanat d'appoint), leur surnom mais surtout la nature des pièces de terre, c'est à dire ce qu'on y plante. Il en ressort que la châtaigneraie domine notre terroir au 17ème siècle, très loin devant la vigne et le blé. On découvre enfin les microtoponymes occitans, c'est à dire le nom des pièces de terres qui sont riches d'enseignements : grâce à eux on découvre les états antérieurs de la terre, issus de patronymes ou reflétant les caractéristiques géomorphologiques des pièces de terre, les cultures plus anciennes etc.
Exemple : dans notre compoix, une pièce de terre plantée de châtaigniers située aux Luminières est appelée "les Coussouns"(3) mais autrefois ( au 15ème ou 16ème siècle) ce devait être un pâturage car le Trésor de Félibrige de Mistral donne cette définition inattendu. Ou est-ce un toponyme dérivé de l'escossou qui n'est autre qu'un fléau pour battre les épis de blé : dans cette hypothèse, nous avions alors un terre arable ou possédant sur son fond une aire à battre le grain…? Les compoix sont des documents précieux et celui de Sainte Cécile a été heureusement conservé comme une relique par les maires successifs : remercions-en les !
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(1) Parcelles de terres
(2) Hameau de la Commune
(3) Charançon, en langue locale...!
Laurent Aiglon - 12/2004